de M. Le Bris Gilbert (Socialiste - Finistère)

 

QUESTION N° 112293 publiée au JO le : 12/12/2006 page : 12899

M. Gilbert Le Bris attire l'attention de M. le ministre de la santé et des solidarités sur l'incompatibilité, injustifiée selon le monde médical, du don de sang par les personnes atteintes d'hémochromatose. Les personnes atteintes de la maladie d'hémochromatose, maladie qui se caractérise par une surcharge en fer dans le sang, doivent régulièrement faire des saignées. Le sang recueilli est alors jeté, alors que l'on manque de donneurs de sang en France et alors surtout qu'aucun motif médical ne justifie un tel gaspillage. L'hémochromatose n'est pas une maladie du sang, ce n'est pas une hémopathie. Les globules ne sont pas malades, ils ne peuvent transmettre la maladie, qui est seulement due à une hyperabsorption du fer au niveau digestif. Pour autant, des litres de sang sont chaque jour jetés dans les hôpitaux et cliniques de France sans aucun fondement scientifique, au nom d'une application stricte et sans doute erronée du principe de précaution. L'incongruité est poussée à son comble lorsque l'on sait que, puisqu'il n'existe pas de diagnostic systématique de l'hémochromatose, des personnes atteintes de cette maladie sans le savoir continuent de donner leur sang. C'est bien la preuve que les globules ne sont pas atteints. C'est bien la preuve qu'il n'y a pas de danger à recueillir le sang des malades hémochromatosiques. C'est bien la preuve qu'il faut aujourd'hui permettre à toute personne dépistée de devenir donneur de sang régulier, à l'instar de ce qui existe déjà depuis longtemps dans d'autres pays. Il souhaiterait donc que ces dons de sang puissent être autorisés en France et lui demande de lui faire part des mesures qu'il envisage de prendre en ce sens.

 

REPONSE publiée au JO le : 01/05/2007 page : 4195

La contre-indication au don du sang pour les personnes atteintes d'hémochromatose fait partie des mesures de protection des donneurs et des receveurs et fait l'objet d'un réexamen régulier par l'Établissement français du sang et par des groupes d'experts. Un groupe de travail multidisciplinaire sur le thème particulier « hémochromatose génétique et don du sang » s'était réuni en 2000 et avait rendu un rapport en janvier 2001. L'objectif principal de ce groupe était la réévaluation des critères d'aptitude au don du sang au regard de l'évolution des connaissances scientifiques sur l'hémochromatose génétique. La définition de l'hémochromatose génétique recouvre des profils d'expression biologique et clinique variables qui auraient pu conduire par conséquent à reconsidérer, pour certains individus ciblés, la notion univoque de la contre-indication au don du sang. Dans l'optique d'une clarification, le groupe avait proposé de rassembler en quatre stades les caractéristiques biologiques et cliniques des sujets atteints d'hémochromatose ; selon le stade, il aurait pu être envisagé de reconsidérer la contre-indication au don du sang. Toutefois, un consensus n'avait pu être atteint à ce moment. Les arguments justifiant encore aujourd'hui l'ajournement sont d'ordre médical et éthique. Les arguments cliniques et biologiques sont : l'existence de pathologies associées représentant elles-mêmes une contre-indication au don (hépatopathies, myocardiopathies, diabète), une prévalence élevée et inexpliquée de marqueurs d'hépatites virales, la description de septicémies à Yersinia enterocolitica (bactérie qui requiert du fer pour sa croissance et impliquée dans des chocs toxi-infectieux post-transfusionnels), l'existence d'une toxicité oxydative du fer libre plasmatique démontrée expérimentalement. Les arguments éthiques évoqués sont un bénéfice secondaire personnel incompatible avec le bénévolat (le prélèvement de sang étant, avant tout, un traitement pour ces sujets) et des règles du don inadaptées au suivi médicalisé de la personne atteinte d'hémochromatose (délais inter-dons, limites d'âge, examens complémentaires biologiques et cliniques). Toutefois, au regard des données scientifiques plus récentes, du travail de la Haute Autorité de santé en juillet 2005 et sachant que certaines personnes atteintes d'hémochromatose ne sont pas considérées comme malades, qu'elles n'ont aucun trouble ou seulement des troubles mineurs du métabolisme du fer, qu'elles n'ont pas de traitement plus poussé qu'une surveillance, il est envisagé de demander à un groupe d'experts piloté par l'Établissement français du sang de réévaluer la pertinence de la contre-indication au don du sang des personnes atteintes d'hémochromatose.