-         Dans le domaine anatomique, les mécanismes des troubles de l’érection sont simples. De chaque côté de l’urètre (canal qui conduit l’urine de la vessie à l’extérieur), il y a dans la verge des corps caverneux constitués de cavités qui se remplissent de sang sous tension et assurent l’érection, c’est-à-dire la rigidité de la verge. En dehors de ce moment, les corps caverneux sont vides. La verge est flasque. Sous l’action de substances chimiques, les corps caverneux se dilatent, se remplissent de sang et il y a un phénomène de blocage du sang sous l’action d’autres substances chimiques et érection. Une anomalie : pas d’ouverture des corps caverneux, insuffisance d’apport de sang, insuffisance de maintien du remplissage, provoquent des troubles de l’érection.

-         Sur le plan thérapeutique, de grands progrès ont été faits.

LES CAUSES GENERALES DES TROUBLES DE L’ERECTION

Tout d’abord, l’Hémochromatose Héréditaire est méconnue en tant que telle dans la liste des facteurs de risque connus qui sont :

1)      L’hypertension artérielle et l’insuffisance cardio-vasculaire ; le tabagisme, le diabète, l’obésité, la sédentarité, les hyperlipidémies, les dyslipidémies.

2)      Les facteurs de risque non vasculaires : hormonaux, troubles prostatiques bénins, la fibrose des tissus érectiles de la verge, les traumatismes de la verge, les troubles du sommeil psychologiques et psychiatriques et les états de fatigue chronique.

3)      Les facteurs iatrogènes : médicaments, chirurgicaux ou radiothérapiques.

4)      Les facteurs de risque non médicaux (en particulier l’âge), environnementaux.

LES CAUSES DES TROUBLES DE L’ERECTION DANS L’HH

En réalité, dans l’Hémochromatose Héréditaire, il peut y avoir plusieurs causes qui sont toujours secondaires. Le malade a connu une période de vie sexuelle normale habituellement. Parmi ces causes :

-         La surcharge en fer au niveau de l’hypophyse et/ou des testicules mêmes peut entraîner un hypogonadisme d’origine centrale (si hypophyse atteinte) ou d’origine périphérique (si testicules atteints) avec diminution de la testostéronémie. C’est une indication rare mais précise qui peut faire discuter le dosage de la testostéronémie (hormone fabriquée par le testicule) et l’administration de testostérone (sous surveillance).

-         L’asthénie, tout court, peut être surtout sexuelle et révéler l’hémochromatose. La dysfonction sexuelle pourrait être retenue comme un marqueur clinique de l’état de santé. Les saignées, efficaces sur le plan général, ont donc tout leur intérêt dans ce cas.

-         Le diabète sucré, complication de l’hémochromatose, entraîne des facteurs de risque propres, à la fois vasculaires, neurologiques, hormonaux mais aussi psychologiques.

-         Souvent en plus l’anxiété, la dépression, consécutives à la fatigue, à la prise de conscience de la maladie chronique, aux difficultés socio-économiques agissent comme facteurs aggravants.

Donc, en dehors de la  prise en charge spécifique de l’hémochromatose (saignées), le patient présentant une dysfonction érectile peut bénéficier des progrès récents tout en sachant que les causes sont le plus souvent multi-factorielles.

LA CONSULTATION MEDICALE EST NECESSAIRE

L’écoute du patient (difficile pour le malade de parler de ce problème), l’examen clinique permettent de recentrer les rares examens complémentaires nécessaires : évaluer la participation psychologique, les facteurs organiques, rassurer le patient prend du temps mais s’appuie sur les nombreuses possibilités thérapeutiques qui redonnent de l’espoir. Même si des causes organiques précises existent, la prise en charge de l’élément psychologique est souvent nécessaire.

LES TRAITEMENTS

Les traitements pharmacologiques efficaces ont pris leur essor à partir de 1981 avec la démonstration de la possibilité de provoquer une érection en injectant de la Papavérine directement dans les corps caverneux (Dr VIRAG). Ce fut ensuite la mise au point des alpha-bloquants puis des Prostaglandines, toujours en intra-caverneux. Mais auparavant il y a eu d’autres traitements par :

1)      Hormone de substitution (au défaut de testostérone) : injection intramusculaire de testostérone (Androtardyl R 250 mg une fois par mois mais il faut surveiller la prostate et le foie (risque de cancer à long terme). Plus récemment Andractim et Androgel R.

2)      Auto-injections intracaverneuses faites par le sujet lui-même après essai. Le sujet s’injecte des prostaglandines E1 ; résultats variables ; complications minimes.

3)      Aide mécanique à l’érection : création d’un vide à l’intérieur d’un cylindre où le patient a introduit la verge. La rigidité de la verge est obtenue par un afflux de sang. On met un anneau de latex à la base du pénis pour maintenir l’érection.

4)      Prothèses péniennes (implantées dans la verge) soit semi-rigides ou hydrauliques après destruction du tissu érectile. Les résultats sont variables.

5)      Surtout par voie orale, le grand progrès est le fait des inhibiteurs de la phosphodiestérase. Il existe d’abord le Sildenafil (Viagra R) dès 1998, puis d’autres molécules de ce type : Cialis (Tadalafil), Levitra R(Vardenafil). Ces substances sont bien tolérées sauf chez les malades qui prennent des dérivés nitrés pour leur cœur (contre-indication formelle).

Des applications intra urétrales ou percutanées sont aussi proposées et même, dans l’avenir, des thérapies géniques.

CONCLUSION

Des possibilités réelles de prise en charge de ce trouble fréquent chez l’HH mais souvent méconnue ou cachée existent. C’est dans le dialogue au sein de son couple, avec son médecin, avec un spécialiste, que pourra s’établir une évaluation des troubles, des facteurs de risque et que des traitements adaptés en fonction des situations cliniques, psychologiques et organiques intriquées, des souhaits de traitement ou non, pourront être proposés. Finalement c’est l’un des éléments indispensables de la vie d’aujourd’hui, celui de la communication.

 

Dr Jean-François LOUIS

Praticien Hospitalier - Service d’urologie

Hôpital Carémeau - 30000 Nîmes

Tél. : 04 66 68 68 68

 

Cet article a été écrit par le Dr LOUIS. Ce n’est pas une « ordonnance médicale », les malades hémochromatosiques doivent consulter leur généraliste qui les adressera, s’il le juge utile, à un sexologue ou urologue… En effet une prise en charge médicale, comme l’écrit le Dr LOUIS, est nécessaire car ces troubles doivent être pris en charge par un médecin. Je remercie vivement le Dr LOUIS pour sa disponibilité et pour la compréhension de ce problème des hémochromatosiques. Cet article m’a été demandé par de nombreux malades. Encore une fois, n’hésitez pas à nous écrire si vous désirez que soit traité un sujet qui vous préoccupe. 

Pr Henri MICHEL

Bulletin bimestriel n° 76 - Septembre-Octobre 2004